Aviateurs de l'opération Marathon

Dernière mise à jour le 11 janvier 2023.

Clifford Lionel HALLETT / 1585043
Somerset, Angleterre
Né le 9 septembre 1922 à Yeovil, Somerset, Royaume-Uni / † le 15 juillet 2013 à Chard, Somerset, Royaume-Uni.
Sgt, RAF Bomber Command 10 Squadron, mitrailleur dorsal
Lieu d'atterrissage : près de l'aérodrome d’Evreux/Saint-André-de-l'Eure, commune de Marcilly-la-Campagne, Eure, France.
English Electric Halifax B Mk III, MZ630, ZA-S, abattu la nuit du 2 au 3 juin 1944 par deux chasseurs lors d'une mission sur Trappes.
Écrasé à Saint-André-de-l'Eure, Eure, France.
Durée : 2 mois
Camps : Fréteval

Informations complémentaires :

Rapport d'évasion SPG 3321/2079.


Photo prise à Thornaby, Yorkshire.

L'appareil décolle de Melbourne à 22h33. Après le largage des bombes sur l'objectif et alors que le Halifax entame son virage de retour, il rencontre une formation de chasseurs Messerschmitt. Lors de l'attaque, trois moteurs prennent feu et l'appareil perd de l'altitude. Tandis que le pilote, Fl/Off Alexander A. Murray, reste à bord pour stabiliser l'appareil et assurer ainsi leur évacuation, Clifford Hallett, dont c’était la 10ème mission, saute en premier suivi de quatre autres hommes. A peine Hallett a-t-il actionné l'ouverture de son parachute qu'il aperçoit l'avion exploser en plein ciel. Le F/Off Murray et l'opérateur radio, W/Off John Williams, perdront la vie. Ils sont enterrés au Cimetière Municipal de Saint-André-de-l'Eure. Le bombardier Sgt E. F. Stokes, la jambe cassée, fut immédiatement fait prisonnier et emmené à l'hôpital.

Trois hommes (le navigateur Fl/Off Stanley Albert Booker, le mitrailleur arrière Sgt Terrance Gould et le mécanicien Sgt John N. Osselton parvinrent à s'évader en même temps que Hallett. Après avoir été aidés par le Centre de Résistance de Nonancourt, Booker, Gould et Osselton arrivent à Paris et sont cachés à l’Hôtel Piccadilly, en plein centre, lieu de rendez-vous galants bien connu de la Gestapo. Tombés dans le piège du traître Jacques Désoubrie à la solde des Allemands, ils y furent arrêtés, respectivement les 28 juin, 1er juillet et 13 juillet 1944, puis incarcérés à Fresnes avant d'être envoyés au Camp de Buchenwald, puis au Stalag Luft 3 à Sagan en Pologne.

Après avoir heurté le sol, Hallett cache son parachute, son harnais et sa Mae West dans un buisson d’ajoncs au bord de la route vers Les Authieux. Comme il n’y avait pas de clôture à cet endroit, il s’éloigne rapidement, sautant un fossé. Il rampe à travers un champ de blé et s’arrête vers 02h30 dans un bois tout proche. Réveillé au matin par des voix s’exprimant en allemand et des aboiements de chiens, il s'encourt sans être aperçu, puis se rend compte à la lecture d'un écriteau d'interdiction qu'il s'était abrité, toujours dans son équipement de la RAF, tout près d'un aérodrome allemand.

Après une marche d'environ 6 km à travers champs, il se cache dans un autre bois. Il se remet alors en route, contourne deux villages et traverse un bois avant de remarquer une ferme dans un petit village. Il s'adresse au fermier, qui lui donne de l'eau et du pain et du gruau d'avoine à manger Il peut dormir là pendant six heures et à son réveil, il se rend compte que tout son uniforme et son kit d’évasion ont été emportés, hormis l’argent de son kit. On lui dit qu’il serait emmené par la Résistance avec laquelle le fermier avait pris contact. Dans l'après-midi du 4 juin y arrive un homme de taille imposante, "Michel", le chef de la Résistance locale, et dont Hallett apprendra plus tard qu'il fut arrêté une semaine plus tard et fusillé. Après avoir interrogé Hallett, "Michel" fait brûler son uniforme et lui donne d'autres vêtements.

Hallett est alors conduit, caché dans le coffre d'une Fiat, vers une maison à La Madeleine-de-Nonancourt. Là, le fermier Élie Raphaël THOROSSOV (erronément orthographié Thorrosov dans un article d'Andrew Heavens dans le journal local "Chard and Ilminster News" du 8 juin 1994, et également repris ailleurs comme "Thoroson") accepte de le nourrir et le loger. L'article précise que d'origine arménienne, THOROSSOV, son épouse et leurs deux filles (l'une d'entre elles prénommée Sirane, prénom que Hallett donnera plus tard à l'une de ses propres filles) l'hébergent chez eux, caché dans un grenier, pendant trois semaines. A noter que dans son rapport d’évasion, Hallett mentionne un séjour là de "13 jours (jusqu’au 16 juin environ)".


Le couple THOROSSOV en 1994 (via Clifford Hallett en 2012)

Le 16 juin, des Résistants arrivent à la ferme et lui remettent une carte d’identité. Après avoir été guidé à pied à travers Nonancourt, il est transporté en voiture vers une autre maison où il rencontre "le chef de la Résistance locale". Dans un récit ultérieur, Hallett mentionne qu’il a été mené chez la famille "ESQUERRE" (?) à Nonancourt. Le 17 juin, le chef et un guide ont escorté Hallett et "le 2nd Lt Lewis" à pied sur 8 kilomètres en direction de Dreux. Ce Lewis est Donald Murley Lewis, pilote de chasse (voir sa page sur le présent site). Un autre guide les a alors escortés pendant environ 16km jusqu’à un café. De là, Hallett, Lewis et les deux Australiens ont été conduits en voiture (une Fiat) vers le Sud par le Dr DUFOUR (René DUFOUR, Rue de Reverdy à Chartres, Eure & Loir), sans que leur destination leur soit dévoilée. La voiture s'arrête à l'orée d'un bois et on leur présente "Lucien Belgrade" (en fait le Wing Commander belge Lucien BOUSSA), chef du camp de la Forêt de Fréteval, qui leur explique que sont cachés dans le camp d'autres hommes se trouvant dans la même situation qu'eux. Boussa interroge les quatre aviateurs pour s'assurer de la véracité de leurs dires. Londres ayant confirmé par radio, les quatre hommes sont ensuite admis dans le camp.

Au cours de son séjour, Hallett, se plaignant de douleurs, sera soigné par les Docteurs Aimé TEYSSIER père et son fils Louis, du 46 Rue de la Gare à Cloyes, qui diagnostiquent une blessure interne provoquée par sa chute dans la nuit du 3 juin. Hallett est fort handicapé dans ses mouvements et sera informé par BOUSSA qu’en cas d’évacuation forcée du camp suite à une intrusion des Allemands, on ne pourrait le transporter et il devrait alors tenter de tenir le coup tout seul, sans dévoiler quoi que ce soit pendant au moins 24 heures. Heureusement, il n’en fut rien…

Après la libération du camp le 13 août par l’arrivée de troupes américaines, Hallett est évacué en camion vers Le Mans, puis Bailleux. Il rentre en Angleterre par avion le 18. Après un congé, il sera affecté à l'Air Sea Rescue Service de la RAF, et participera à partir d'octobre à quelques missions de sauvetage en mer.

En avril 1994, Clifford Hallett et sa seconde épouse Dorothy en visite en France, passeront par la ferme des Thorossov à Nonancourt pour exprimer leur reconnaissance à la famille.

Des photos ainsi que certains détails figurant dans le texte, nous ont été aimablement fournis par le regretté Clifford Hallett lui-même en mars 2012.


La cachette de Hallett chez les Thorossov à La-Madeleine-de-Nonancourt.

Clifford Hallett et sa femme Dorothy en avril 1994 devant la maison des Thorossov (les escaliers ménent à sa cachette).
Photo du "Chard and Ilminster News", 8 juin 1994, que Clifford nous a transmise en 2012.


Lettre de Clifford Hallett en 2012

Elie THOROSSOV fêtera son 100ème anniversaire le 7 novembre 1987 et recevra à cette occasion une carte de la part de la Reine Élisabeth d’Angleterre. Clifford Hallett nous a fait parvenir une photo de la cérémonie :



La plaque en l’honneur de l’équipage du MZ630
(photo prise lors d’une cérémonie qui a eu lieu à en octobre 2021 à Illiers-l’Evêque – via Patricia Vinycomb, fille du navigateur Stanley Booker).

Voir aussi la page http://www.rafinfo.org.uk/rafescape/freteval/hallett.htm


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters