Personne passée à une autre ligne d'évasion

Dernière mise à jour le 08 décembre 2011.

William Stephen WOOD / 19065441
Santa Rita, Grant County, New Mexico, USA (engagé à San Francisco, Californie)
Né le 22 août 1916 en Oklahoma / † le 23 octobre 1977 à Santa Rosa, Californie
Sgt USAAF, 8th Air Force Combat Camera Unit, photographe
Lieu d'atterrissage : à 2 km au Nord de Saint-Omer, Pas-de-Calais, France
Boeing B-17F-BO Flying Fortress, n° 42-29530 (de l'USAAF 305 Bomber Group 365 Bomber Squadron), XK-Y "Moonbeam McSwain" / "Boom Town Jr" abattu par la Flak le 27 août 1943 lors de la mission sur Bois du Ham (base de lancement de fusées V-), au Nord de Saint-Omer, Pas-de-Calais, France
Ecrasé entre Tilques et Saint-Martin-au-Laert, près de Saint-Omer, Pas-de-Calais, France.
Durée : 3 mois
Passage des Pyrénées : le 06 novembre 43

Informations complémentaires :

Le Missing Air Crew Report relatif à la perte de cet appareil : MACR 394. Rapport d'évasion E&E 252, disponible en ligne.

Le Sgt Wood ne fait pas partie du 305 Bomber Group mais y est attaché en tant que photographe.

L'appareil décolle dans la soirée de Chelveston et est touché par la Flak au-dessus de Saint-Omer, quelques instants avant le largage de ses bombes. Le compartiment radio, un des moteurs gauche et une des conduites de carburant sont touchés. Une seconde salve atteignant la queue provoque un incendie et, le feu se propageant dans tout l'habitacle, la décision est prise de quitter l'appareil.

Outre le pilote, le Lt Don Williamson Moore, 3 autres membres de l'équipage perdront la vie : l'opérateur radio Sgt Harold M. Graham (son parachute était en feu et il aurait été tué par la suite) ; le mitrailleur droit Sgt David J. Pearlman et le mitrailleur ventral S/Sgt Joseph F. Kosmicky Jr (enterré à Colleville-sur-Mer, en Normandie).

Cinq autres seront fait prisonniers : le copilote Lt Robert J. Coffman (d'abord évadé, arrêté 4 jours après le crash) ; le bombardier Lt James W. Meade ; le navigateur Lt David S. Smith ; le mécanicien/mitrailleur dorsal S/Sgt Warren C. Seyfried ; le mitrailleur gauche S/Sgt Trevor W. Falkner.

Seuls William Wood et le mitrailleur arrière S/Sgt James A. King parviendront à s'évader. James King sera évacué via la Bretagne par Shelburne - Opération "Bonaparte" - canonnière MGB503 quittant la France pour l'Angleterre dans la nuit du 29 au 30 janvier 1944 - Rapport d'évasion E&E 343.

William Wood délaie l'ouverture de son parachute jusqu'à 4000 m et atterrit entre deux hôtels près de l'un des bras en forme de "Y" d'un canal à environ 2 km au Nord de Saint-Omer (Canal de Neufossé ?). Il a une cheville froissée et, tout en repliant son parachute, il aperçoit un groupe de français lui faire signe de se dépêcher, des soldats allemands s'approchant du coin. Un homme lui amène un canot léger, lui donne un verre de cognac et l'enjoint de partir rapidement et de se rendre à la bifurcation du canal puis d'emprunter ensuite l'autre bras du canal. Tandis qu'il rame, Wood entend des coups de feu, voit des traces de balles ricocher sur l'eau devant lui et pense à se rendre. Entendant d'autres coups de feu, et ne semblant pas en être la cible, il décide de continuer à ramer et il apprendra plus tard que des résistants français avaient tué les deux soldats allemands qui l'avaient visé et qu'à la nuit tombée ils avaient piétiné leurs cadavres pour les enfoncer dans la boue du canal.

La bifurcation atteinte, Wood saute dans le canal, atteint la berge opposée et se cache près d'un arbre. Quelques minutes plus tard, des hommes arrivent dans une plus grande embarcation et le mènent vers un autre côté du canal et une étable où il passe la nuit. Ils lui apportent de quoi manger "ainsi qu'un mélange de cognac, de lait et de café". Ils le font se déshabiller et lui donnent des vêtements civils, un peu étriqués. Il avait gardé ses belles chaussures "Oxford" et les hommes les lui enlèvent, cette marque de luxe dans les talons pouvant le trahir.

Il y a quelques incohérences entre ce qui précède, mentionné par Wood dans son rapport, qui ne cite aucun nom de personne ni de localité, et ce que nous avons pu retrouver dans des archives et souvenirs de témoins locaux de l'époque.

Gaston PLEHIERS, de Saint-Omer, explique que Wood est recueilli le 21 août par Mme DEBART, demeurant au Tourniquet à Saint-Omer, et est caché ensuite par Marcel GARS, habitant au 11 rue Alphonse Deneuville à Saint-Omer. Marcel GARS renseigne à ce sujet qu'il avait été prévenu le 27 par Mme DEBART-DEGOTTE (Le Tourniquet, Saint-Omer) que Wood, qui avait d'abord été aidé par JORION et son beau-frère (du Marais des Tilques), avait besoin d'aide. GARS déclare qu'il a hébergé cet aviateur 1 jour dans sa hutte de chasse dans les marais de Saint-Omer. Le dernier paragraphe du rapport de Wood confirme la chose, car il écrit que le matin suivant (le 28), "un français et sa femme" viennent le chercher en bateau pour l'amener aux abords de Saint-Omer. La femme précède les deux hommes en entrant dans la ville et, à l'approche d'un gendarme, prend peur, lève les mains en l'air et, comme son mari, déclare à Wood qu'ils ne peuvent plus rien pour lui.

Wood rebrousse alors chemin et marche tout seul vers le Nord, passant devant un terrain d'exercice où une centaine de soldats allemands ne font pas attention à lui. Arrivé à un cul-de-sac de canaux, il tombe sur un endroit qui à son avis aurait pu être un bordel (sic) bien que la vingtaine de femmes qui s'y trouvent n'aient pas l'air de prostituées. Deux de ces femmes l'emmènent en bateau à travers un dédale de petits canaux jusqu'à une petite mare où elles le cachent dans un cabanon dont il pense qu'il sert de cachette lors de chasses au canard. Il dort là le reste de la journée et la nuit suivante. Il termine en disant que c'est de cet endroit que la suite de son voyage et de son évasion fut organisée.

Un rapport de Marcel GARS précise qu'après la nuit passée par Wood dans son cabanon, il l'a remis à Julien BARTHELEMY de Saint-Omer. Ceci est confirmé dans les mémoires de Gaston PLEHIERS, qui précise que, prévenu par l'Abbé GOURQUIN, curé de la paroisse Saint Denis à Saint-Omer, Gaston PLÉHIERS, accompagné de Marcel GARS, André BOUBERT (169 rue de Dunkerque à Saint-Omer) et Julien BARTHELEMY (route de Clairmarais à Saint-Omer) mènent Wood en bateau jusqu'à l'habitation de ce dernier où il passe la nuit.

Le lendemain matin, Arthur GAQUIERE (rue Le Sergent à Saint-Omer) vient y chercher Wood pour le conduire en camionnette (de M. DEWAELE fils) chez Gaston PLÉHIERS, rue Victorien Sardou où il passe deux jours. [Marcel GARS, Gaston PLEHIERS, André BOUBERT et Arthur GAQUIERE seront arrêtés au printemps 1944 et déportés à Amberg, mais ils reviendront d'Allemagne en 1945].

Les trois évadés sont pris en charge par des agents du réseau français Centurie. André BOUBERT et son épouse Jeanne CAMUS au 169 Rue de Dunkerque à Saint-Omer logent cinq aviateurs. Trois autres aviateurs de l'équipe de Gaston PLEHIERS sont ramenés à Paris par Mlles LE MEUR et Louise LENOIR, collaborarices de Madeleine DUMONT. Parmi ceux-ci figurent les noms de William Wood et Walter Satterfield. Ces demoiselles ne peuvent revenir chercher les deux autres (Mertes et Greer) le lendemain et communiquent un nouveau rendez-vous à PLEHIERS.

L'aviateur est ensuite remis entre les mains de MM CHEVALIER et LECOINTE, respectivement directeur du Crédit Lyonnais et tanneur, qui, avec l'aide de Gabriel CONSTANT, de Lumbres (Pas-de-Calais), chauffeur de la camionnette, emmènent Wood le 30 août chez Norbert FILLERIN à Renty-par-Fauquembergues, où il reste jusqu'au 12 Octobre. Gabriel CONSTANT et Norbert FILLERIN ont également été arrêtés par la suite et envoyés en Allemagne.

A propos de Norbert FILLERIN, voici des renseignements reçus par Philippe Goldstein : "Norbert FILLERIN (Pas-de-Calais) fut l'un des membres les plus actifs du réseau Pat O'Leary et fut arrêté en mars 1943 à Paris (sur trahison de Roger Leneveu). Ce fut ensuite Fresnes, puis Buchenwald, Flossenburg et le Kommando de Hradischko. Il fut libéré le dernier jour de la guerre en Europe, le 08 mai 1945. Après son arrestation, sa femme Marguerite avec l'aide de ses 3 enfants continua les activités d'aide aux Evadés ... Wood rentre dans ce cas-là, surtout qu'il n'est pas resté seulement 1 ou 2 nuits, mais bien 6 semaines, chez Mme Fillerin avec d'autres pilotes en fuite."

Gabriel CONSTANT, quant à lui, trouvera la mort en déportation au camp de Sachsenhausen.

Le 12 octobre, Wood est transféré à Auxi-le-Château via Fruges et Hesdin, et le 15, lors d'un voyage organisé par le réseau d'évasion Bordeaux-Loupiac, un groupe de "6 ou 7 aviateurs", dont Wood, est conduit à Amiens par Joseph BECKER d'Auxi-le-Château. Son adjoint pour la région Nord, le journaliste Eugène HEGEDOS ("Antoine"), est l'un des convoyeurs vers Paris. Du voyage en même temps que Wood, PLEHIERS rapporte qu'il y a certainement les aviateurs Ernest George Boucher (RAF 174 Squadron - Typhoon JP547 - abattu le 5 octobre 1943 - SPG 316/11595 - évadé et tué en mission par la suite le 5 août 1944), Edwin A. Haddock (RAF - matricule 135404 - Typhoon - abattu le 15 juillet 1943 - Prisonnier), Graham White " Skeets " Kelly (RAF 107 Squadron - Boston BZ237 abattu le 27 août 1943 - arrêté à Paris), Harold R. Merlin (RAF 175 Squadron - Typhoon JP577 - abattu le 16 août 43 - évadé SPG 3323/2432), Leslie A. Prickett (RAF 41 Squadron - Spitfire XII EN236 abattu le 27 août 43 - arrêté à Paris) et Eugene F. Williams (S/Sgt USAAF 303rd Bomb Group - abattu le 27 août 43 - Prisonnier au Stalag Luft 4).

PLEHIERS dit que ces aviateurs étaient convoyés par Mlle Marie-Rose ZERLING (12 Rue Saint-Ferdinand à Paris XVIIe) et que "les autres aviateurs venaient d'Armentières". Tous sont remis à Paris à "M. HENRI", habitant Rue Boussingault dans le 13e Arrondissement et responsable du réseau Bordeau-Loupiac pour la région parisienne. Comme indiqué, la plupart de ces aviateurs se feront arrêter par la suite.

Le rapport de Wood, dont la partie manuscrite des notes de son intervieweur est difficilement déchiffrable, mentionne son passage par Tarbes à la fin octobre. Il se froisse un tendon en passant les Pyrénées et arrive en Espagne le 6 novembre 1943, atteint Gibraltar le 28, qu'il quitte en avion le 2 décembre pour arriver à Bridgewater en Angleterre le lendemain. Il est interrogé par l'I.S. 9 le 4 décembre.

William Wood repose au Santa Rosa Rural Cemetery à Santa Rosa, California.

Merci à René Lesage et à Chris Coffman (fils du copilote) pour les renseignements qu'ils nous ont communiqués. [René Lesage : www.histoirehautpays.com]

Note : Gaston PLEHIERS est l'auteur de : "Rapport sur mon activité clandestine dans la région de Saint-Omer pendant la guerre 1939-1945", dans Mémoires de guerre du Centre Ouest du Pas-de-Calais, 1991, tome III.

Gaston Pléhiers et son équipe fournirent plusieurs aviateurs à Comète en 1944, ce qui explique que Wood, aidé en 1943, est souvent repris comme aviateur de Comète. C'est avec cette réserve que nous intégrons William Wood parmi les aviateurs de ce site.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters