Personne capturée durant son évasion

Dernière mise à jour le 21 décembre 2018.

Charles Maurice BETZEL / O-744176
1407 Harrison Street, Davenport, Iowa.
Né le 23 mai 1922 en Oregon / † le 18 juillet 1980 à Davenport, Scott County, Iowa, USA.
Grade 2nd Lt, USAAF 91 Bomber Group 322 Bomber Squadron, bombardier.
lieu d'atterrissage : entre Vaudignies et Chièvres, à proximité de la ferme Nisol, Hainaut, Belgique.
Boeing B-17-BO Flying Fortress (Forteresse Volante), 42-29656, LG-S / "Skunkface", abattu par quatre FW 190 le 20 février 1944, lors d'un raid sur Aschersleben / Leipzig, Allemagne.
Atterri, vide de ses occupants, dans un champ derrière la gare de Lens, au NO de Mons, Belgique.
Durée : 2 mois
Arrêté : le 25 ou 27 avril 1944 à Anvers (fausse ligne KLM).

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 2460.

Cet appareil est initialement appelé "Terrible Ten" dans le 303rd Bomb Group avant d'être transféré au 91st le 5 juillet 1943. Rebaptisé "Skunkface" après son passage au 91st Bomb Group, il décolle à 09h25 heure anglaise de Bassingbourn avec comme objectif principal Leipzig, Aschersleben comme secondaire. Sur le vol du retour après le largage des bombes, il est attaqué à hauteur d’Aschersleben par des chasseurs Fw190. Le B-17 a un moteur complètement détruit, deux autres fortement endommagés. Il perd de l’altitude et il est aperçu pour la dernière fois à environ 30 km au sud-ouest de Bruxelles, toujours sous contrôle vers 1500m, le moteur n°3, le seul encore valide, dégageant beaucoup de fumée. Le pilote, 2nd Lt Ernest B. Kidd, donne l’ordre d’évacuer et tous sautent à hauteur de Lens.

Le pilote Kidd atterrit en plein milieu de la base de la Luftwaffe à Chièvres, tout comme le mitrailleur gauche, le Sgt Billie L. Ramsey. Ils sont immédiatement arrêtés et retrouvent leur navigateur, le 2nd Lt Billy H. Huish et d’autres membres de leur équipage emprisonnés dans l’ancien couvent de Bauffe, en bordure du champ d’aviation : le copilote 2nd Lt Benjamin G. Beauclair, touché à la poitrine et dans les jambes lors de l’attaque ; l’opérateur radio, le T/Sgt Theodore J. Mazor, blessé à la tête ; le mitrailleur droit, le Sgt Ernest B. Serna ; le mitrailleur arrière, le Sgt Francis A. Hentges ; le mitrailleur dorsal, le Sgt Ober L. Torvik et le mitrailleur ventral, le Sgt Rex Wertman, blessé, la gorge transpercée lors de son évacuation en parachute. Le Sgt Wertman, hospitalisé à Mons comme Ramsey et Beauclair, mourra le 28 février lors de leur transport en ambulance vers un hôpital de Bruxelles. Avant cela, Ramsey et Huish avaient fait une tentative d’évasion au cours de laquelle Ramsey est blessé, Huish parvenant à s’enfuir. Billy Huish sera aidé pendant 2 mois dans la région de Chimay, se retrouvera avec d’autres aviateurs évadés dans le maquis de Rièzes et sera assassiné par des soldats allemands lors du raid du 22 avril 1944 dans les bois de Saint-Rémy-lez-Chimay. [Voir la page de William Campbell]

Charles M. Betzel, qui s’était engagé le 12 avril 1942 à Des Moines, Iowa, en est à sa 15ème mission ce 20 février 1944. Il se casse une cheville en atterrissant dans un champ et, incapable de marcher, rampe jusqu’à un petit canal ouvert pour s’y cacher. Il aperçoit des gens à distance, mais ne se manifeste pas, ignorant s’il s’agit de civils ou de soldats allemands. Au crépuscule, un jeune garçon, Michel, le fils du fermier Maurice NISOL, s’approche de lui et, malgré qu’il ne parle pas anglais, fait comprendre à Betzel qu’il devrait lui donner son parachute pour qu’il puisse le cacher. Pointant sur sa montre, le garçon indique à l’aviateur qu’il reviendrait plus tard. A la tombée de la nuit, le garçon revient, aide Betzel à se lever et le conduit clopin-clopant à la ferme de ses parents.

Selon les souvenirs de Daniel GERARD, 17 ans à l’époque, consignés en 1999 et que nous a transmis Robert Delespesse, c’est bien Michel NISOL, le fils du fermier qui a aidé Charles Betzel à se cacher dans la grange de la ferme de ses parents. Comme les patrouilles allemandes s’intensifient dans le coin, Maurice NISOL prévient son chef, Émile DESTREBECQ (10 Rue de l’Egalité, Ath), résistant comme lui dans le Front de l’Indépendance. Ce dernier se rend chez Hilaire GERARD (le père de Daniel) pour l’aviser de ce qu’il y avait "un colis" à prendre chez les NISOL.

Au crépuscule du 20 février, Hilaire GERARD et Émile DESTREBECQ se rendent à vélo à la ferme NISOL, suivis par Daniel, le jeune fils de Gérard. Daniel se cache à environ 2 km de la ferme et un peu plus tard, voit son père et DESTREBECQ le rejoindre avec Betzel, toujours revêtu de sa combinaison de vol. L’aviateur, légèrement blessé à la tête, mais souffrant fortement de sa cheville, ne peut pédaler et on le fait s’asseoir à l’arrière d’un tandem. Le petit groupe roule jusqu’à Ath et arrive à la maison des GERARD, 1 Rue de l’Egalité. Daniel GERARD se rend immédiatement chez leur médecin de famille, le Dr LENGLET et le ramène auprès de Betzel. Le médecin lui prodigue les soins nécessaires pendant les 2 jours et 3 nuits que l’aviateur passera chez les GERARD.

Le 21 février, leur voisine, Yvonne COPPIN, qui parle l’anglais, vient apporter un chapeau et des vêtements civils à l’aviateur. Après un conciliabule avec des résistants cheminots, il est décidé de faire évacuer Betzel vers Bruxelles. Le 23 février, le jeune Daniel GERARD guide Betzel jusqu’à la gare d’Ath et l’accompagne en train jusqu’à Bruxelles. Arrivés à la Gare du Midi, le chef de train, de connivence, les conduit vers une sortie de la gare non surveillée par les Allemands. Daniel et Betzel vont alors à la "Taverne des Jacques", Place de la Constitution, Saint-Gilles, à deux pas de la gare. Muni d’un exemplaire de la revue de propagande allemande "Signal" dépassant de sa poche droite, Daniel y est approché par un homme disposant également de la revue, placée dans sa poche, du même côté. Daniel voit Betzel s’éloigner avec l’inconnu et, de retour chez lui à Ath, il apprend que dans l’après-midi Émile DESTREBECQ avait reçu un coup de fil de Bruxelles lui annonçant "Marchandise bien arrivée mais en mauvais état".

Les archives d’EVA quant à elles indiquent que "Nil DELMÉE, receveur des contributions à Lanquesaint (près d'Ath, Hainaut), a hébergé Betzel et l'a remis à EVA le 20 février 44", information peu crédible, en tout cas quant à la date, car c’est celle de la chute de l’avion… Jean PORTZENHEIM s’occupera de Betzel en tant qu’officier welfare. Entré officiellement à EVA par "Philippe" (Paul HELLEMANS) le 27 février 1944, Charles Betzel est renseigné comme sorti d’EVA le 24 avril 1944.

Convoyé par Jean PORTZENHEIM, Betzel est alors acheminé vers Anvers. Entraîné dans la fausse filière KLM, Betzel est arrêté (dans un article paru aux États-Unis après son retour de captivité, il déclare avoir été trahi par un "Quisling") et il est placé en confinement solitaire pendant 21 jours. Menacé pour dévoiler l'identité des Belges qui l'ont hébergé durant deux mois et cinq jours, il ne dévoile rien et est finalement envoyé au Stalag Luft 3, puis en marche forcée jusqu’au Stalag 7A à Moosburg, où il est libéré le 29 avril 1945 par des troupes américaines de la 14th Armored Infantry Division.

La photo en uniforme est de Jacqueline Willis, cousine de Charles Betzel. Les autres photos et diverses informations nous ont été aimablement transmises par Robert Delespesse, tout jeune témoin Lensois du crash de l’avion à l’époque.


Carte de prisonnier de Charles Betzel au Stalag Luft 3 à Sagan (Pologne)

Décédé en 1980, Charles Betzel repose au Oakdale Memorial Gardens à Davenport, Scott County, Iowa, USA.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters