Aviateurs de l'opération Marathon

Dernière mise à jour le 06 décembre 2011.

John Loren TONEY / 15110064
College Corner, Montgomery County, Ohio, USA
Né le 14 février 1919 dans le Preble County, Ohio, USA / † le 04 décembre 2011 à Anchorage, Alaska, USA
Sgt, USAAF 457 Bomber Group 748 Bomber Squadron, mitrailleur gauche
près de Moerbeke-Waas au Nord de Lokeren, Flandre Orientale.
Boeing B-17G-BO Flying Fortress, 42-38055, K /, abattu par des ME-109 et endommagé par la Flak le 27 mai 1944 lors d'une mission sur Mannheim et Ludwigshafen.
Atterrissage forcé/Ecrasé à Overslag, Brandstraat, Moerbeke-Waas.
Durée : 15 semaines.
Camps Marathon : Villance, Acremont, Bohan-Bellevaux.

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 5298. Rapport d'évasion E&E 2058 (disponible en ligne).

En route vers l'objectif, la formation est attaquée par une nuée de chasseurs Me110. Le 42-38055 est touché et, avec deux moteurs en feu, l'appareil quitte la formation, le pilote Birkman espérant pouvoir amener l'appareil jusqu'en Suisse. Il n'a pas le temps de prendre le nouveau cap que des obus de la Flak atteignent l'avion, incendiant le moteur n° 3. Sans espoir de pouvoir rejoindre même l'Angleterre, Birkman donne l'ordre de sauter et tous quittent le B-17 à hauteur de Moerbeke.

Roger Birkman et cinq hommes de son équipage parviendront à s'évader: le navigateur, Lt Michael Stanko, le mécanicien T/Sgt Raymond Koch, le bombardier Lt James Cochran Jr , le mitrailleur John Toney (la présente fiche) et le copilote le Lt Alexander Kucherenko.

Les quatre autres hommes seront fait prisonniers: l'opérateur radio Sgt Andrew Kafka, le mitrailleur droit Sgt James C. Jones, le mitrailleur ventral Sgt John Buechel et le mitrailleur arrière Sgt Errol Bailey. Michael Stanko, d'abord évadé, sera arrêté par la suite à Aalst / Alost le 14 juin 1944 (le 18, selon le Lt Cochran, qui se trouvait avec lui et Koch à cette période).

Toney atterrit dans un champ où il aperçut une femme coupant des mauvaises herbes. Après avoir caché son parachute, son harnais et sa Mae West dans un buisson le long d'un fossé, il voit que l'un de ses camarades était tombé dans un arbre à proximité. Ayant fait signe à la femme qu'il voulait aller aider l'autre aviateur, elle lui fit comprendre que les Allemands n'étaient pas loin.

Dans son rapport d'évasion, Toney indique qu'un fermier le recueillit dès son atterrissage et qu'il est resté caché jusqu'au soir dans un champ d'orge. Dans un récit beaucoup plus récent, il dit qu'un homme (vraisemblablement Frans D'HOOGE) apparut qui lui fit signe de le suivre. Peu de temps après, son guide fut pris à partie par une patrouille allemande. Toney se tapit dans l'herbe, craignant le pire. Il apprit beaucoup plus tard que son guide, malgré un fusil pointé dans les côtes, avait maintenu qu'il ne savait rien d'un quelconque parachutiste. La patrouille s'éloigna et l'homme revint vers John. De peur d'être à nouveau remarqués, ils rampèrent dans les champs sur près d'un kilomètre avant de pouvoir marcher à nouveau normalement.

Son rapport mentionne qu'on lui apporta de la nourriture et des vêtements civils avant qu'il soit mené vers Moerbeke où il logea 4 nuits chez les DE WINDT. Il ne cite pas son nom, mais c'est vraisemblablement Willy VAN DAMME qui le conduisit chez la famille DE WINDT à Moerbeke, où la maîtresse de maison parlait anglais. On lui prépara à manger ainsi qu'un bain et le lendemain, la fille aînée de la maison partit à vélo reconnaître la route vers une autre cachette. On le mena alors à Sint-Niklaas, au dernier étage d'un immeuble. Dans son rapport E&E, Toney précise que ce sont quatre jeunes hommes qui le conduisirent à vélo à Sint-Niklaas où il rencontra son copilote Kucherenko et que tous deux logèrent chez un couple à la Elizabethstraat (Kucherenko cite les VAN KERCHOVE au n° 9 de cette rue et parle d'un séjour total d'1 mois chez eux et les BIDESS, dont partie donc chez VAN KERCHOVE en compagnie de Toney)..

Toney indique qu'un jeune belge se cachait là, pour échapper au travail obligatoire, comme beaucoup de ses compatriotes. Il signale qu'alors qu'ils étaient là depuis 2 semaines, Kucherenko et lui virent y arriver leur pilote Birkman, la cheville sérieusement blessée. Birkman sera caché quelques maisons plus bas au n° 71 chez Georges SMETS, directeur d'une usine et chef d'un réseau de résistance dans la région, et il y restera jusqu'à la libération de la ville le 9 septembre.

Toney mentionne un passage dans la maison de Georges SMETS, où on lui demanda les noms de ses co-équipiers. A l'époque, Toney ignorait que le copilote habituel de son groupe avait été remplacé le matin même par le Lt Kucherenko. Il ne s'en rendit compte que lorsqu'il rencontra Kucherenko et Birkman chez le marchand de charbon Lucien VAN KERKHOVE dans une maison proche de celle des SMETS. C'est chez les VAN KERKHOVE que les aviateurs apprirent le Débarquement en Normandie.

Un dimanche (vers le 1er juillet selon le rapport E&E de Toney), alors que les VAN KERKHOVE avaient quitté leur domicile pendant quelques heures, Kucherenko signala qu'il avait envie de poursuivre sa route vers le sud. Ne sachant pas très bien pourquoi, Toney partit avec lui. Le premier pont qu'ils rencontrèrent (sans doute celui sur la Durme à Elversele) était gardé par de jeunes soldats Allemands. S'étant rendu compte que ceux-ci ne contrôlaient aucun des passants, ils franchirent le pont et poursuivirent leur route.

Après des kilomètres d'une marche épuisante, les pieds en sang, on les fit se cacher dans le grenier d'une ferme appartenant à un boucher. Ensuite, on les mena à la maison de ce qu'ils considérèrent comme un "véritable espion" belge, toujours impliqué dans des missions dangereuses. Il revint un jour, la selle de son vélo trouée par une balle allemande alors qu'il avait été aperçu épiant du matériel apparemment secret. L'homme revenait souvent de ses sorties avec des morceaux d'obus, et surtout, avec des informations, qu'il transmettait vers la Suisse.

Le rapport de Toney ne mentionne pas ces derniers détails et indique seulement que lorsqu'ils quittèrent la maison des VAN KERKHOVE, ils marchèrent pendant environ 60 km vers le Sud, traversant Dendermonde / Termonde et Aalst / Alost où ils furent pris en charge par "une autre organisation" (Comète). Kucherenko mentionne un Louis "DE ROME" (DE ROOM ?), il s'agit de Louis DE ROM, comme hébergeur à St Gillis-Dendermonde, donc de Toney et lui, du 10 juillet au 10 août… ( ?)

Un jour (le rapport de Toney indique que c'était le 1er août), un homme arriva de Bruxelles en voiture et conduisit les deux aviateurs en direction de la capitale. Ils passèrent sans problème un contrôle routier, leur chauffeur parlant l'allemand. Dans l'Appendix "C" de son rapport, Kucherenko reprend le nom de LEEMAN, Bruxelles, et signale qu'il travaille pour le Ministère de l'Education et que c'est lui qui est venu les chercher à Dendermonde pour les amener à Bruxelles et qui leur a procuré de faux papiers.

Arrivés à Bruxelles, les deux hommes furent cachés dans la maison d'un militaire belge qui n'y logeait pas, car, ayant été blessé, il fuyait les allemands. Toney déclare qu'après un séjour de deux semaines à Bruxelles, Kucherenko et lui furent guidés en train vers Namur par un "Mr LEMAN" qui s'était chargé de l'achat des billets. Selon un rapport de Gaston MATTHYS, nous savons que c'est en effet Charles LEEMAN qui les prit alors en charge (à nouveau, donc), apparemment directement depuis Wavre.

Toney poursuit son rapport en disant qu'arrivés à la gare de Namur, ils furent pris en charge par des guides, qu'ils accompagnèrent à vélo, roulant vers le Sud pendant 50 à 60 km. Ceci est en contradiction partielle avec la mention à d'autres sources que c'est en train que Toney et Kucherenko firent le voyage vers les Ardennes.

Il est fort probable que Toney et Kucherenko sont passés par le camp de Porcheresse avant d'être transférés vers celui de Bohan. Quelques jours plus tard, des soldats américains arrivèrent au camp et ils furent libérés. Peu après, Toney ne crut pas ses yeux lorsqu'il vit arriver son frère, présent dans la région avec une unité terrestre et qui avait été avisé de sa présence dans le camp. Amené en camion à Paris avec d'autres aviateurs, Toney y est interrogé le 12 septembre par l'I.S. 9 et rentre le lendemain en Angleterre où il rejoint son unité. Il est rapatrié quelques jours plus tard aux Etats-Unis.

Merci à Justine Mallo, la sœur de John Toney, qui nous a communiqué via Marilyn Walton, la photo de son frère ainsi que le texte écrit par John et dont beaucoup de ce qui précède est une traduction résumée. Celle-ci a été complétée par des éléments figurant dans son rapport d'évasion et des détails sur un site relatant à la fois le sort de l'avion et de son équipage, et la visite de John Toney et de la fille du pilote Birkman à Moerbeke-Waas en 2004 (photos et vidéo).


En Ohio chez les Toney peu après la guerre : Toney et Kucherenko avec Georges et Marie Smets.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters