Personne passée par Comète via les Pyrénées

Dernière mise à jour le 15 mars 2015.

Albert BREWER / 20434636
1331 North West, 75th Terrace, Miami, Floride, USA.
Né à Lima, Ohio, le 05 avril 1920 / † le 30 septembre 1997 à Hialeh, Floride, USA
S/Sgt, USAAF 384 Bomber Group 547 Squadron, mitrailleur arrière.
Lieu d'atterrissage : à 5 km au Nord-Ouest de Poperinge, Flandre Occidentale, Belgique
Boeing B-17F Flying Fortress, 42-29768, SO-X / "Winsome Winn II", touché par la Flak puis abattu par la chasse allemande le 01 décembre 1943 lors d'une mission sur Solingen.
Ecrasé près de Poperinge, Belgique.
Durée : 5 mois.
Passage des Pyrénées: le 03 mai 1944.

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 1336. Rapport d'évasion E&E 656, disponible en ligne.

L'appareil décolle de Grafton-Underwood et selon le rapport de Brewer, la Flak touche le B-17 dans le moteur n° 2 alors qu'ils survolent la Belgique en route vers l'objectif. Peu après le largage des bombes sur Solingen, ce moteur s'arrête subitement et ne peut être mis en drapeau. Ralenti et perdant de l'altitude, l'appareil perd le contact avec la formation. A l'approche de la côte, le moteur n° 3 rend l'âme et le B-17 est attaqué par quatre chasseurs Me109. Ces appareils ennemis semblent accompagnés d'un B-17 qui, selon Brewer peut être un de ceux que la Luftwaffe a récupéré après un atterrissage forcé en Allemagne ou en pays occupé, et qui relaie des informations aux serveurs de la Flak. A l'approche de Poperinge, le pilote du 42-29768, 2nd Lt Darwin G. Nelson, sort le train d'atterrissage et amorce une descente. Les chasseurs allemands s'esquivent et disparaissent.

Vu la situation et l'impossibilité de rejoindre l'Angleterre, Nelson donne l'ordre d'évacuer l'avion. Huit hommes sont faits prisonniers : le pilote Darwin Nelson ; le copilote 2nd Lt Elmer L. Smith ; le navigateur T/Sgt Joseph H. Harrison (blessé par un éclat d'obus qui lui traverse la cuisse) ; le bombardier 2nd Lt Sam E. Drake ; le mitrailleur dorsal T/Sgt Vincent Gregorich ; le mitrailleur ventral S/Sgt John H. Turner ; le mitrailleur gauche S/Sgt Antonio C. Gomez, Jr et le mitrailleur droit S/Sgt Francis M. Seager.

Seuls Brewer et l'opérateur radio T/Sgt Curtis Easley parviendront à s'évader. Easley est resté caché en France jusqu'à la libération - E&E 2189.

Albert Brewer saute à environ 4000 m et atterrit non loin d'un village et il voit une bonne quarantaine de fermiers courant à sa rencontre. Par prudence et après s'être débarrassé du harnais et de son parachute, Brewer s'encourt dans la direction opposée, atteignant un bois où il voit d'autres gens venant vers lui. Un des hommes, excité, s'adresse à lui, Brewer lui répond, mais l'homme ne le comprend pas, sauf le terme "American". La situation éclaircie, Brewer lui donne alors ses chaussures de vol et ses bottes.

Tandis que l'homme parle avec les autres, quelqu'un crie "Allemands !" et tous s'égaillent, laissant Brewer tout seul. Il se réfugie dans un bois, entend quelqu'un approcher et se tapit au sol. Un policier allemand passe non loin de lui mais ne le voit pas. Environ 15 minutes plus tard, un jeune garçon arrive criant "Hello, boy !" et rejoint Brewer qui s'était mis debout. Brewer offre une cigarette au garçon, qui lui dit qu'il va l'emmener en sécurité. La partie dactylographiée du rapport de Brewer s'arrête là, mentionnant seulement que le garçon le mène ensuite à une ferme d'où son voyage sera organisé.

Il y a davantage de détails dans la partie manuscrite du rapport, de la main d'un intervieweur à-l'écriture-très-difficilement-déchiffrable. Il en ressort que le garçon le guide jusqu'à l'autre extrémité du bois où Brewer restera caché jusqu'à la soirée. Vers 18h00, le garçon revient pour le guider jusqu'à une ferme du côté Nord du bois. Brewer cite un DANIEL (vraisemblablement le prénom du fermier), sa femme, leur fille d'environ 20 ans, leur fils d'environ 12 ans. Arrive vers 21h30 ce que nous devinons être un ami de DANIEL, un certain CHARLES, environ 30 ans, avec lequel il roule à vélo jusqu'à Poperinge, à environ 5 km de là.

Il semble que Brewer soit resté 22 jours à Poperinge chez le père de ce CHARLES. On évoque une visite de ou chez la sœur de DANIEL, mariée, 2 enfants. Il est également fait mention d'un ami de DANIEL, en permission depuis un camp en Allemagne près de Kiel, où il avait dû travailler à réparer des dégâts dus aux bombardements alliés.

Un jour, peut-être durant la 2e semaine de décembre, CHARLES et DANIEL contactent un homme, grand, visage fin, assez nerveux, ayant vécu 15 ans auparavant aux Etats-Unis et qui emporte les plaquettes d'identification de Brewer avant de partir pour Bruxelles. A son retour, cet homme lui dit que Brewer pourra partir pour Bruxelles cinq jours plus tard et que tout est arrangé pour son évasion.

Il semble que ce soit le 23 décembre que Brewer accompagne cet homme à vélo jusque Ypres où Brewer loge dans une pièce secrète aménagée dans l'Hôtel REGINA, 45 Grote Markt, tenu par Urbain et Marguerite DE SMUL. Il semble à Brewer que cet hôtel appartenait à l'organisation et il apprend que Claude Leslie y était passé également. Brewer y voit le frère de l'homme en question et trois guides. Il ajoute qu'à Ypres, il a rencontré d'autres évadés. Son rapport ne le mentionne pas, mais nous savons de qui il s'agit.

Le major d'infanterie Fernand DEFISE, habitant au 54 Avenue Beau-Séjour à Uccle, est résistant à l'Armée Secrète à Ypres. Il contacte le chef de zone local d'une mission du 2e Bureau militaire, Flaminius au sujet de cinq aviateurs. Son radio Georges JOAKIM (alias "Guineapig" ou "Vivian"), accompagné de Jacques BUSKIN DES ESSART et de Jacques GUIOT (?) vont à Ypres et ramènent les aviateurs à la gare de Bruxelles-Midi.

C'est ainsi que Brewer et James Akins, William Dolgin, Henry Dzwonkowski et Claude Leslie sont pris en charge à Bruxelles par le Service EVA le 24 décembre 43. Le rapport de Brewer indique que JACQUES (qui avait été arrêté par la Gestapo puis relâché) les a accueillis à l'arrivée. Ils seront confiés à Charles HOSTE et Dolgin et Akins resteront sous sa charge jusqu'au 23 mars 44.

Brewer, lui, reste jusqu'au 26 avril 1944, date à laquelle Charles HOSTE va le conduire en tram jusque chez Prosper SPILLIAERT. On le prend en photo (le photographe porte une moustache et son visage porte des traces de brûlures) et il doit remplir un questionnaire.

Selon le rapport EVA, Charles HOSTE convoie alors Brewer et Claude Leslie chez Amélie GILSON, la cinquantaine, au 8a Rue Mercelis à Bruxelles, près de chez Jeanne POT. Le rapport de Brewer reprend le nom d'un M. GASTON qui les a ensuite placés ailleurs. On devine que ce GASTON leur a parlé de 29 à 46 américains dont il s'occupait, et le chiffre d'environ 100 est lié à sa mention de la Hollande (pour " décembre "…). Apparemment, on apprend alors à Brewer le sort de certains de ses co-équipiers, mais on ne peut déchiffrer ce qu'il en est et si par exemple certains d'entre eux auraient également atteint Bruxelles avant d'être arrêtés ( ?).

Plus loin, on devine les noms de Wollf, Martin, Nelson et il est fort probable qu'il s'agisse de trois aviateurs dont il croise la route : William Wolff, Benjamin Martin et Nelson Campbell.

La phrase suivante indiquant un départ pour une gare. Il doit s'agir de la gare du Midi, d'où partent les trains pour Paris. Brewer reste deux jours à Paris et il est mentionné Nesles-la-Vallée, au Nord-ouest de Paris. Il se trouve près de Creil le 27 avril et signale y avoir vu un important contingent de troupes allemandes. Albert Brewer est également logé deux nuits, du 27 au 29 avril chez Marcel RENARD, boulanger à Nesles-la-Vallée en Seine & Oise avec Benjamin Martin et William Wolff.

Il n'y a pas d'autres renseignements dans son rapport d'évasion, mais nous savons que Brewer est accompagné de Paris à Bayonne par Marcel ROGER et qu'il loge à Sutar à l'auberge Larre de Jeanne MENDIARA.

Il fait partie du 95e passage de Comète, avec Dzwonkowski, Wolff et Martin cités plus haut ainsi que Robert Wernersbach. Ils passent par Souraïde et Quito borda, avec les seuls guides de Juanito BIDEGAIN (Michel ECHEVESTE et son frère Joseph Marie).

Albert Brewer arrive à Gibraltar le 16 mai et y est interrogé par le MIS. Il quitte Gibraltar le 20 mai et arrive à Bristol en Angleterre le lendemain pour être interrogé à nouveau à Londres par le MIS.

Merci à Peter Vertstraeten pour ses infos sur Flaminius.


(c) Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters