Personne passée par Comète via les Pyrénées

Dernière mise à jour le 25 janvier 2020.

Billy James HOOKER / T-325
Collinsville, Grayson County, Texas, USA
Né le 29 décembre 1921 au Texas/ † le 3 mai 1987 à Robstown, Texas
Fl/Off, USAAF 388 Bomber Group 563 Squadron, copilote
Tombé près de Sint-Katelijne-Waver, au nord-est de Mechelen / Malines, Province d’Anvers, Belgique.
Boeing B-17G Flying Fortress (Forteresse Volante), n° série 42-30202, Q-?, abattu par la Flak et achevé par Hans Walter Sander du 8./JG26 lors de la mission du 30 juillet 1943 sur Kassel (usines Waldau Fieseler).
écrasé près de Berlaar, du côté de Broek Els, au sud-est de Lier, Province d'Anvers
Durée : 9 semaines
Passage des Pyrénées : le 3 octobre 1943

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 3125. Rapport d'évasion E&E 226 disponible en ligne.

L’appareil décolle de Knettishall et doit effectuer des manœuvres pour se positionner dans la formation, dont certains appareils doivent la quitter pour problèmes techniques ou autres. C’est le cas également pour le 42-30202 et sur le vol du retour, l'appareil est touché par la Flak à hauteur d'Anvers. Le moteur n° 2 est en feu et les flammes s’étendent jusqu’à l’arrière. Voyant la tournure des événements, Billy Hooker, qui à ce moment avait pris le relais de son pilote, le Fl/Off Earl E. Pickard, donne l'ordre d'évacuer. Tous les hommes sautent à hauteur de Rijmenam / Putte, près de Malines. Pickard sera fait prisonnier comme huit autres membres de son équipage. Parmi ceux-ci, trois parviendront un temps à échapper à la capture, le bombardier Wallace Soderberg, le navigateur Robert Hoke et le mitrailleur ventral Donald Boyd. Les autres sont l’opérateur radio T/Sgt Walter E. Togel, le mitrailleur dorsal T/Sgt Orville W. Lewis, les mitrailleurs latéraux S/Sgt Ralph T. May et S/Sgt Sam H. Tucker Jr, ainsi que le mitrailleur arrière S/Sgt Harlan C. Oakberg.

Billy Hooker (la présente fiche) saute en dernier d’une altitude de 6700 m derrière le bombardier Soderberg. Hooker n’actionne l’ouverture de son parachute que vers 3000 m et c’est à ce moment qu’il voit l’avion exploser. Il atterrit dans des ronces au bord d’un pré, ne parvient pas à dégager son parachute et, entendant des cris et des bruits de course au loin, il court se cacher dans une cabane. Parmi la vingtaine de belges qu’il avait aperçu s’approchant de la zone, un homme le découvre et, en lui donnant une tape dans le dos, lui dit en français savoir qu’il est Américain. L’homme essaie de se faire comprendre par signes puis prend Hooker par la main, avant de s’arrêter un peu plus loin, faisant signe à Hooker de s’éloigner de lui, trop de gens circulant à proximité. La foule s’étant éloignée, l’homme guide Hooker à travers les buissons et s’arrête après 200 m au bord d’un champ. Il lui dit d’attendre son retour et de ne pas bouger de l’endroit.

L’individu revient vers 23h00 accompagné de deux hommes et on le guide vers une maison à environ 7-8 km au nord de Malines / Mechelen. Le lendemain 31 juillet, arrive un homme ne connaissant pas l’anglais non plus auquel Hooker montre la carte de son kit d’évasion, lui expliquant qu’il souhaite atteindre Bruxelles et puis l’Espagne. L’homme lui avait apporté des vêtements et Hooker l’accompagne à vélo jusqu’à Malines. Les deux hommes se rendent dans une maison dans la ville où ils attendent l’heure proche du départ du train vers Bruxelles. Le guide lui achète des tickets, s’assure que Hooker monte bien dans le train, puis le quitte. Le train est plein à craquer et Hooker fait le voyage debout, le contrôleur poinçonnant son ticket sans problème.

A Bruxelles, il passe le contrôle sans encombre, et, une fois sorti de la gare, il se dirige vers le sud, aidé de la boussole de son kit d’évasion, trouvant ainsi une route principale menant vers l’extérieur de la ville. Il précise qu’il portait un manteau et un pantalon, tous deux bien trop grands pour lui. Le tout complété par une chemise, des chaussures noires et un béret, son kit d’évasion placé dans une poche de son manteau. La route (vraisemblablement celle de Bruxelles à Charleroi) le mène près de Genappe. Il dort la nuit suivante dans un champ de blé et très tôt le lendemain, il commence à marcher sous la pluie en direction de Charleroi, qu’il traverse en début de matinée. Du brouillon manuscrit de son rapport d’évasion, difficilement déchiffrable, et de la version dactylographiée, il ressort qu’il avait marché ensuite pendant trois jours, ne recevant que peu de nourriture là où il s’adressait sur son chemin, se nourrissant de pommes vertes qui le rendirent malade. Il dut souvent s’arrêter en chemin, prétendant être sourd-muet lorsqu’il demandait de l’aide. Des cloques à ses pieds freinent sa marche et l’obligent à s’arrêter souvent. Arrivé après trois jours, dans la soirée, aux abords de Beaumont, près de la frontière française, il passe la nuit suivante dans une haie au bord d’un champ de blé.

Le lendemain, il demande de l’aide à 2-3 personnes, sans succès, poursuit sa marche et tente de trouver des endroits où des personnes âgées s’occupent de leur jardin. Il arrive à une ferme où il montre à un homme âgé qu’il a soif. L’homme l’introduit chez lui, lui offre du café, de l’eau, du pain et lui recommande de se raser. Le fermier ne peut l’aider davantage et Hooker se remet en route, reçoit de l’eau à une autre maison où il s’arrête avant d’atteindre une troisième maison où il reçoit également de l’eau, ne demandant cependant pas d’autre aide ni ne dévoilant son identité.

Dans l’après-midi, il arrive à un village où il s’adresse à un homme conduisant une charrette de foin. L’homme lui demande s’il a de l’argent et devant la réponse négative de l’aviateur lui donne un billet. Muni de cet argent, Hooker va s’acheter quelques biscuits dans une boulangerie et poursuit sa marche, s’arrêtant à une autre maison où on lui donne de l’eau sans l’aider davantage. Il poursuit en indiquant qu’il passe cette 3ème nuit caché dans la haie bordant un champ de blé, sachant d’après sa carte qu’il devait se trouver tout près de la frontière.

Vers 04h00 du matin (donc le 2 août) il se remet en route en direction du village où il voit deux gardes belges de faction à la sortie du village. Il observe l’endroit, voit un individu passer la barrière, puis l’un des gardes entrer dans le corps de garde, le deuxième faisant de même alors que Hooker, ne pouvant rebrousser chemin, s’approche de la barrière. Il franchit celle-ci, s’attendant à tout instant à être interpellé, mais rien ne se passe. Environ 1km plus loin, après un tournant dans la route, il aperçoit un poste de contrôle français. Un douanier français lui demande ses papiers et Hooker lui fait des signes indiquant qu’il ne peut parler. Il fait semblant de chercher ses papiers dans ses poches, fait comprendre qu’il ne les trouve pas et fait mine de rebrousser chemin. Le douanier le laisse aller, en direction de la frontière belge et Hooker s’engage alors dans un sentier menant vers des champs, sous l’œil des douaniers belges de l’autre côté. Avant d’atteindre la frontière belge, il traverse un petit bocage et débouche sur un champ de blé où plusieurs fermiers sont au travail. Hooker fait semblant de travailler avec eux à ramasser des fagots et finit par s’adresser à l’un des fermiers, lui demandant s’il pouvait l’aider à traverser la frontière vers la France.

Tous les fermiers se concertent et concluent qu’ils n’ont aucun moyen de l’aider à réaliser ce projet. L’un d’entre eux, cependant, lui propose de le mener chez lui et là, son épouse, qui connaît quelques mots d’anglais, fait appeler un garçon dont elle pensait qu’il comprenait cette langue. Le garçon en connaît encore moins que la dame, mais Hooker parvient cependant à lui faire comprendre son problème. Il peut prendre un bain, la dame lui procure des chaussettes propres et des bottes en caoutchouc pour atténuer l’effet de ses cloques. Ensuite, le garçon le conduit à vélo vers une maison à environ 5km de là. Selon l’Appendix «C» du rapport, ce serait la maison de la famille du garçon du côté français et où il serait resté huit jours.

Un homme vient l’y chercher pour le guider à vélo vers Charleroi, dans la maison d’une dame parlant anglais et qui lui annonce qu’un autre homme viendra le chercher pour le conduire à Bruxelles. Cet homme, un ingénieur travaillant à Charleroi et dont le cousin émet sur les ondes de la BBC chaque lundi matin à 7 heures, arrive donc et pose des questions à l’aviateur en vue de s’assurer de son identité. Il le guide ensuite en train vers Bruxelles jusqu’à la maison de sa mère, qui avait vécu pendant 12 ans en Egypte. Hooker reste sept jours dans cette maison avant qu’une jeune femme aux cheveux noirs, 1m62, environ 70kg, le guide vers la maison de Robert ZANNEN (= Jean Robert ZANNEN, rue de la Mutualité à Uccle, époux de Léa LEFEVRE), dont le beau-frère Gérard LEFEVRE logera les aviateurs Leon Levens et Malcom Eckleberry, l’appartement des ZANNEN étant trop petit pour loger plus qu’un évadé.

Hooker reste loger sept jours chez Jean ZANNEN et sa femme. La même jeune femme qui l’y avait amené vient le rechercher pour le transférer à la maison d’une dame de nationalité française, parlant l’anglais. Cette dame a deux fils, dont l’un sert d’interprète pour les Allemands, l’autre est caché quelque part, s’étant évadé d’un camp de prisonniers en Allemagne. Hooker loge 14 jours chez cette dame avant d’être déplacé vers la maison d’un policier chez qui il reste neuf jours. Il est rejoint là par quelques aviateurs de la RAF et par Joseph Aquino. Ce dernier cite la date du 17 septembre comme étant celle de cette rencontre avec Hooker.

Hooker et Aquino sont ensuite menés à une gare par un homme au nez balafré, aux cheveux roux, couvert de taches de rousseur. Deux jeunes hommes les prennent alors en charge et prennent un train avec Lille pour destination finale. Ils descendent du train avant la frontière, que le petit groupe franchit à pied. Arrivés à Lille, Hooker et Aquino sont confiés à un homme qui les accompagne en train jusque Paris. Là, il les guide vers la maison d’un médecin vivant avec sa mère. Huit jours plus tard, ce médecin les guide jusqu’à une gare où il les confie à une dame parlant anglais, mesurant environ 1m70, 60kg, les cheveux noirs et portant des lunettes à monture en corne. La dame les accompagne en train jusqu’à Bordeaux où ils rencontrent Joseph Walters, Charles Bennett et Kenneth Fahncke.

Le rapport d’évasion de Hooker ne le mentionne pas, mais d’autres sources nous apprennent qu’à Bruxelles, il a transité par les sœurs Georgette et Régine DE VREUGHT au 23 Avenue Arnold Delvaux à Uccle, toutes deux de la section d'Elie MIROIR. Régine est veuve d'un officier et est résistante à l'Armée Secrète. Mme Elsie PECHER du 210 Avenue Molière d'Ixelles lui sert de guide, de même que Mme Emma BERGER qui le mène chez elle au 87 Avenue Louis Lepoutre à Ixelles. Il semble qu’il ait également été pris en charge par la cellule de Simone SCHREYEN.

On le renseigne aussi comme hébergé 10 jours chez les VAN TUYKOM à Woluwé-Saint-Pierre, 2 rue Martin Lindekens et pris en charge dans Bruxelles par Aline DUMONT.

Il est fort possible que Hooker et Aquino aient logé du 24 septembre au 1er octobre chez Geneviève ARNAUD au 2 Rue Falret à Vanves. Ils y sont conduit par le Dr HABREKORN, du module de logement de Maurice GRAPIN.

Comme Charles Bennett, Joseph Aquino, Kenneth Fahncke et Joseph Walters, Billy Hooker loge à Sutar à l'auberge Larre de Jeanne MENDIARA. Ils sont amenés à Larressore par Denise HOUGET, Jean-François NOTHOMB et Marcel ROGER et guidés ensuite à Jauriko borda à la frontière espagnole par les guides de Pierre ETCHEGOYEN, effectuant ainsi la 60e traversée de Comète. Ils arrivent à San Sebastian puis passent au consulat de Bilbao qu’ils quittent le lendemain de leur arrivée.


Mot de remerciement de Hooker dans le carnet de Pierre Elhorga.

Son rapport d’évasion précise que Billy Hooker est interrogé le 11 octobre par le Lt Grady Lewis, qu’il est à nouveau interrogé le 2 novembre, qu’il arrive à Gibraltar le 10 novembre et qu’il quitte Gibraltar par avion le 20 novembre 1943, arrivant le même jour à Bristol en Angleterre.

Billy Hooker repose au cimetière de Sandia, situé entre les localités d’Alice et Mathis, dans le Jim Wells County au Texas.


(c) Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters