Personne passée par Comète via les Pyrénées

Dernière mise à jour le 13 mars 2019.

William Patrick MAHER / O-797343
620 Summer Street, Manchester, New Hampshire, USA
Né le 19 octobre 1915 dans lr New Hampshire, USA / † 18 mars 1953 à Nut Cove, Newfoundland (Terreneuve), Canada
1 Lt, USAAF 303 Bomber Group 358 Bomber Squadron, navigateur.
à environ 2km du centre d’Epagne-Epagnette, au sud-est d’Abbeville, Pas-de-Calais, France.
Boeing B-17F-BO Flying Fortress, n° série 42-29635, VK-M / "AUGERHEAD", abattu au-dessus d'Amiens le 31 août 1943 lors d'une mission sur l’aérodrome d’Amiens/Glisy.
Ecrasé à Brunville, Seine-Maritime, entre Le Tréport et Dieppe, France
Durée : 3 semaines.
Passage des Pyrénées : le 22 septembre 1943

Informations complémentaires :

Rapport de perte d'équipage MACR 470. Rapport d'évasion E&E 118 disponible en ligne.

L’appareil décolle de Molesworth vers 16h30heures (heure anglaise = 14h30 heure continentale) et, peu après le largage de ses bombes, rencontre des défaillances techniques dans le moteur n° 4, qui ne peut être mis en drapeau. Alors qu’il survole Amiens, il est touché par des obus de la Flak et vu les très fortes vibrations et le fait que l’avion devient incontrôlable, le pilote, 1st Lt William J. Monahan, donne l’ordre de sauter. Dès cet instant, le bombardier, 2nd Lt Walter Hargrove ouvre la trappe d’évacuation et quitte l’appareil juste devant Maher, qui ne voit que le seul parachute de Benepe en-dessous de lui.

Le pilote Mohahan, son copilote le 1st Lt Louis M. Benepe (et non Benep comme repris à l’E&E), le mitrailleur dorsal S/Sgt Walter Gasser, les mitrailleurs latéraux Sgt Vernon E. Olson et le S.Sgt James H. Comer Jr seront faits prisonniers. Le mitrailleur arrière Sgt David Miller perdra la vie. Il repose au cimetière américain de Colleville-sur-Mer en Normandie.

Outre William Maher, quatre autres hommes parviendront à s’évader : le mitrailleur ventral Alfred Buinicky (qui sera arrêté par la suite), le bombardier Hargrove (évacué par la corvette MGB 318, Opération FELICITATE, depuis Ile-Tariec en Bretagne le 26 décembre 1943 – E&E 293) , l’opérateur radio S/Sgt Frank Kimotek (évacué depuis Camaret-sur-Mer , Bretagne, le 23-25 octobre 1943 à bord du « Suzanne-Renée » - E&E 134) et le 11ème passager, le photographe Sgt Verdis Barton Pryor (membre du 359 Squadron, traverse toute la France, principalement à pied, passe la frontière espagnole près de Cerbère le 23 décembre 1943 et rentre en Angleterre le 5 février 1944 – E&E 377).

Lors de son évacuation, William Maher perd sa boîte de secours et sa sacoche de monnaie, qui tombent de la poche de sa combinaison de vol et il ne dispose que d’un couteau comme matériel d’aide à l’évasion. Il saute à 7000 m, n’actionne l’ouverture de son parachute que vers 5000 m et atterrit à environ 2 km du centre du village d’Epagne.

Plusieurs personnes s’approchent de lui et lorsqu’il a enlevé son équipement, ils lui montrent un bois, lui conseillant de courir s’y réfugier. Il commence à courir et après environ 100m arrive dans le bois où il se débarrasse de son parachute, de son harnais et de sa Mae West. Un jeune garçon marche sur la route longeant la lisière du bois et Maher, resté à l’intérieur du bois, le suit jusqu’à l’entrée du village d’Epagne. Maher parle un peu français et comprend que le garçon lui dit de rester caché jusqu’au soir dans ce coin du bois.

Vers 18h45 (20h45) trois jeunes Français lui apportent de la nourriture et un costume en velours côtelé gris. Plus tard, Maher et le jeunes gens se mettent en route vers un autre village. Maher indique que tous ces garçons ont environ 10 ans seulement et que l’un d’entre eux, AUBERT, a été le plus efficace. Vers 22h00, il a suivi AUBERT à travers champs puis à travers Abbeville pour arriver à « Le Grand Point » ( ?) où ils dorment dans une meule de foin. Le lendemain matin 1er septembre, il accompagne AUBERT jusqu’à la gare d’Abbeville en vue d’être conduit chez une connaissance du garçon, un assureur spécialisé en expertises habitant à "Berk-sur-Mer" (= Berck). Maher et AUBERT attendent à la gare pendant 3 heures et finalement c’est un homme qui vient les chercher et les mène en autobus à Berck. Arrivés à destination, ils se rendent à la maison de l’assureur où un de ses amis donne 100 francs français à Maher ainsi que d’autres vêtements. Maher reste là la nuit suivante et le lendemain 2 septembre vers 18h00, le chauffeur du bus et un autre homme arrivent avec une camionnette pour conduire Maher à "Campagne" (= Campagne-lès-Hesdin, à une vingtaine de km à l’est de Berck), où il rencontre "le Captain", un militaire retraité, vétéran de la guerre 14-18 chez qui il loge deux jours. Ce capitaine est en fait Georges PICHONNIER (1894-1968), "Tic Tac", chef de la Résistance dans le canton de Campagne-lès-Hesdin.

On fabrique une fausse carte d’identité et un permis de travail pour Maher et Georges PICHONNIER le conduit le 3 septembre dans la même camionnette jusqu’à Arras. Là, il le dépose près de la gare à la maison d’ALBERT, un jeune homme vivant avec sa mère et sa sœur. Il était censé loger là, mais est finalement déplacé vers une autre maison, à Bapaume [plus que vraisemblablement chez Henriette BALESI, 1 Avenue Félix Fauré], où il reste le samedi et le dimanche soir (il précise dans son rapport qu’un pilote anglais, le F/O Edward Kinsella se trouvait là également).

Maher poursuit son rapport en indiquant qu’il est pris en photo dans cette maison par "le Professeur", son premier contact avec l’organisation d’évasion. [Il est vraisemblable que le photographe soit J. SOUILLARD, Rue d’Arras, membre de la Résistance locale.] Maher rapporte avoir pris le repas du soir avec une dame belge (Madeleine selon Kinsella), épouse d’un Anglais. Il mentionne ensuite une dame âgée aux cheveux blancs qui achète des tickets à la gare et qu’il accompagne en train (vers Bapaume ?) Il ajoute que le samedi (4 septembre) Kinsella et lui sont accompagnés par elle lors d’un voyage en train d’Achiet-le-Grand jusqu’à Paris. Le rapport de Kinsella mentionne lui que la vieille dame lui avait fourni d’autres vêtements et qu’après s’être rendus, Maher et lui, à la mairie de Bapaume, c’est le maire (Abel GUIDET du 44 Rue de Péronne) qui les a conduit en voiture à Achiet-le-Grand, ce que confirme Maher.

Leur parcours étant dorénavant commun, ce qui suit est une synthèse des rapports respectifs de Maher et Kinsella, l’un donnant des précisions que l’autre ne donne pas et inversement, le tout complété par les informations retrouvées dans d’autres archives.

Arrivés à Paris, la dame les guide pendant 15 minutes jusqu’à ce qu’ils arrivent à une église (« a cathedral », selon Maher) où ils rencontrent un homme aux cheveux clairs, boîtant un peu, moustachu, parlant un anglais approximatif, "the Chief" selon Maher. L’homme leur pose différentes questions pour établir leur identité, avant de leur remettre des tickets de métro. Ils suivent alors dans le métro une femme blonde qui porte un chapeau rouge. En sortant du métro, ils rencontrent un "Robert" aux cheveux blonds, qu'ils suivent jusque dans un appartement occupé par un homme jeune, sa femme et leur bébé de 9 mois, les parents de la jeune femme habitant un autre appartement à un étage inférieur dans le même immeuble. Maher en donne l’adresse : Rue du Cher. Il doit donc s’agir de l’habitation de Mme Odile VERHULST, 64 ans, au 7 Rue du Cher, Paris XXe (Place Gambetta, maison connue des aviateurs comme maison à 4 pattes"). En novembre 1943, au 151 Boulevard Davout Paris XXe, Vassili LAMI, beau-fils d’Odile et époux d’Albertine VERHULST, montre une photo de Maher à William Hartigan. Vassili est le jeune mari mentionné ci-dessus à la Rue du Cher.

Maher rapporte que Kinsella et lui sont restés là treize jours, du 6 au 19 septembre. Maher, qui signale que ROBERT a fait la plus grande partie du boulot, indique aussi qu’ils y ont reçu la visite du "Chief", qui leur a apporté de nouvelles photos et cartes d’identité et leur a expliqué ce qui était prévu pour la suite des opérations. Selon Kinsella, on les a conduit faire prendre des photos dans un (grand) magasin. Il s’agit vraisemblablement du Bon Marché. D’après Kinsella, des arrangements avaient été pris pour leur faire quitter rapidement Paris, mais un raid de B-17 les empêche de quitter la maison au jour dit.

Maher précise que le 19 septembre, Kinsella et lui sont conduits à la Gare d’Austerlitz (par "ROBERT" selon Kinsella, via un parc où il les présente à une jeune dame, environ 30 ans, de petite taille, aux cheveux noirs.) Selon Maher, elle avait attendu tout l’après-midi avec une autre dame dans la crainte d’un raid aérien potentiel, qui aurait pu entraîner une modification de la suite des événements. On leur a acheté des tickets jusque Dax et la petite dame et les deux aviateurs prennent le train pour Bordeaux, voyageant en 1e classe, ne subissant aucun contrôle durant le trajet. Maher précise que lui et la dame se trouvaient seuls dans un compartiment. Le 20, arrivés à Bordeaux, ils rencontrent Jean-François NOTHOMB ("Franco") à la gare et se rendent avec lui jusque Dax. Trois autres évadés sont également dans ce train : Roy Hodge, Archibald Robertson et un Belge (Philippe de Liedekerke)

De Dax, ils se rendent en vélo à Bayonne, où ils arrivent vers 18h00 et arrivent dans un appartement à la tombée de la nuit. Kinsella rapporte qu’il loge à Sutar à l'auberge Larre de Jeanne MENDIARA ( vraisemblablement en compagnie des autres évadés.)

Le 21 septembre, vers 16h00 les évadés accompagnent Jean-François NOTHOMB à vélo jusque Saint-Jean-de-Luz. Avant d’y arriver, selon Maher, ils rencontrent sur une route une dame âgée et son mari venus en voiture pour signaler que la voie vers Saint-Jean-de-Luz était libre. Ils se rendent dans un bois à l’extérieur de la ville. Vers 21h00 le soir du 21, le groupe se met en marche à travers les Pyrénées avec deux guides. C'est le 57e passage de Comète, via la Bidassoa et le groupe passe en Espagne, après une marche rendue plus longue et ardue encore que d’habitude, à cause de la pluie. Les hommes s’arrêtent vers 06h00 à une ferme du côté espagnol. Philippe de Liedekerke et Kinsella, étant les deux plus en forme, quittent cette ferme vers 11 heures et vont à San Sebastian par le tram.

Maher, quant à lui, rapporte qu’à San Sebastian il se rend au consulat américain et que le lendemain matin 23 septembre, un homme vient chercher le restant des aviateurs pour les conduire en voiture à l’ambassade de Grande-Bretagne à Madrid. Maher y est interviewé par le Major Clark et il mentionne que c’est là qu’il a rencontré le Lt Francis Harkins. Maher reste loger cinq jours à Madrid, dont une nuit à l’Hôtel Mora.

Maher arrive à Gibraltar le 1er octobre et il y est interrogé par le major Lewis. Il quitte Gibraltar par avion le 4 octobre et arrive à Bristol en Angleterre le lendemain. A Londres, il est interviewé par le major Richard R. Nelson le 6 octobre, par le major Grady le 7 octobre, puis par le MIS le 10 octobre 1943.

William Maher est décédé le 18 mars 1953 lors du crash du RB-36H Peacemaker n° 51-13721 qui effectuait un vol d'entraînement. Il se trouvait à bord comme opérateur radar. Voir les détails sur cet accident qui a coûté la vie à 23 hommes à http://www.air-and-space.com/b-36%20wrecks.htm#51-13721

La page de ce site est consacrée à l’équipage du Lt Monahan.


Photo de l'équipage : Maher est devant, le 3e depuis la gauche, Buinicky est derrière, le 4e depuis la gauche.

Plaque mémoriale de l'équipage au 8th AF Museum Memorial Gardens.
Les noms repris sont ceux de l’équipage habituel du Lt Monahan avant cette dernière mission.


© Philippe Connart, Michel Dricot, Edouard Renière, Victor Schutters